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36 J Fonds de l'entreprise Normant (manufacture de draps à Romorantin).

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    • Présentation
      Fonds de l'entreprise Normant (manufacture de draps à Romorantin).
    • Introduction

      Bibliographie des 900 représentants du peuple à l'Assemblée Nationale, Paris, 1848. ADLC : G/L 109. CONSEIL GÉNÉRAL CENTRE, Le guide du patrimoine, Centre Val de Loire, Paris, Hachette, 1988. ADLC : G/I 215. DASPET (Philippe), Le canton de Romorantin à travers les cartes postales, Blois, Editions Hugues de Froberville, 1990. ADLC : G/L 243. DUPRÉ (A), Recherches historiques sur Romorantin, Orléans, Edition H.Herluison, 1875. ADLC : Brochure 1766. HAYEM (Julien), Mémoires et documents pour servir à l'histoire du commerce et de l'industrie : la draperie de Romorantin, Paris, Hachette, 1924. ADLC : G/F214. I.N.S.E.E., La Sologne, Direction régionale d'Orléans. ADLC : G/J 31. LALLART (Jean-Yves), Histoire du château de Romorantin, Mairie de Romorantin, 1996. LECLERT (Hélène), Les structures de la population et le développement industriel de Romorantin-Lanthenay, Tours, Mémoire dactylographié, 1970. ADLC : G/F 506. SCHULMAN (Didier), La manufacture de draps et les drapiers de Romorantin à la fin de l'Ancien Régime, pendant la révolution et sous l'Empire, Paris, Mémoire dactylographié 1977. ADLC : G/F 608. VILLEDIEU (Pierre) et LECLERT (Hélène), Contribution à l'histoire économique de Romorantin ; l'industrie drapière au XIXe siècle, Romorantin, Société d'art et d'archéologie de la Sologne, 1982.

      La réputation de Romorantin comme ville drapière remonte au Moyen-Age. En effet, l'industrie lainière apparaît comme une des principales industries de la Sologne, et peut-être, la plus ancienne. Le tissu de laine, principalement destiné à l'habillement, mais également utilisé comme couvertures et tentures, acquiert à cette époque un succès prodigieux avec le drap, qui est un type particulier de tissu de laine : une opération effectuée après tissage lui donne un bel aspect velouté, une surface unie et l'imperméabilise. Romorantin se trouve à proximité de la Sauldre, qui lui fournit une eau de qualité pour le travail de la laine, mais aussi au centre d'un élevage ovin. A l'époque moderne, une multitude de petits fabricants, faisant carder à la main et filer au fuseau, tissaient dans leurs échoppes le " droguet " de Romorantin, sorte de tissu grossier composé d'une chaîne de lin et d'une trame de laine. Charles IX, par son édit de 1571, réglemente les mesures des draps à " une aulne demy-quart de longueur, compris les lisières et d'une aulne de moison ou environ " , une aulne représentant 1,82 mètre. Colbert, en 1666, met en place un règlement corporatif concernant les " drapiers, foulons et tissiers ". Ce règlement limitait la liberté du fabricant en interdisant certains procédés et en fixant notamment les dimensions de chaque étoffe. Il visait à la plus grande perfection possible, au niveau de la matière employée et du mode de fabrication . Cependant, sa mise en application fut délicate comme le montrent les édits successifs tel celui de 1706 destiné à faire respecter les statuts. En 1716, on compte 132 maîtres-drapiers à Romorantin. Le situation est difficile aux environs de 1760, il reste 80 maîtres-drapiers " remis en jurande et par statuts et règlements généraux et particuliers ". La crise est aggravée en 1770 notamment par la concurrence des draperies françaises comme celles de Lodève et du Languedoc, mais aussi des étoffes étrangères. Dès 1760 sont créés de nouveaux moulins à foulon établis sur la Sauldre, notamment au lieu-dit les Gués-Raides, pour le foulage et le dégraissage des draps. En 1779, Necker promulgue une nouvelle réglementation. En parallèle, de nombreux progrès apparaissent spécialement au niveau des teintures, toutes les couleurs sont applicables à Romorantin, sauf l'écarlate. C'est le début de la fabrication de draps pour billard et tapis, de couleur vert naturel. Ce sont aussi les prémices de l'industrialisation dès 1773 avec l'invention de la navette-volante puis de la machine à filer. Enfin, en 1785, apparaissent les premiers métiers à tisser mécaniques, du type Mule-Jenny. Celle-ci correspond à la combinaison de deux machines à filer et permet d'obtenir un fil à la fois solide et régulier. Elle arrive dans la région vers 1811. Le Premier Empire est une période prospère où les fabricants de draps travaillent avec les pouvoirs publics et spécialement l'armée. Pourtant, la grande industrie entraîne peu à peu la fermeture des boutiques des petits artisans. En 1813, dans les statistiques de la situation industrielle en Loir-et-Cher, on compte 1 filature mécanique et 110 métiers à tisser. La sous-mécanisation, causée principalement par les difficultés économiques liées aux emprunts pour l'achat de machines, provoque de nombreuses faillites. Nonobstant ces évolutions, la fabrication de draps subit les réductions de commandes de l'armée (dès 1815), le début du chômage, les épidémies de choléra ainsi que les premières grèves. Vers 1860, il ne reste plus à Romorantin qu'une seule manufacture ; l'entreprise Normant Frères.

      En 1783, Antoine Normant épouse Marie-Anne Marseille. Il s'associe à l'affaire familiale pour créer l'entreprise Normant-Marseille. Avant la Révolution Française, on comptait 60 fabricants de draps dans le département, leur nombre a doublé grâce au ralentissement des contrôles de qualité et grâce à la fin de la réglementation. Dans le tableau de recensement des industries départementales de novembre 1800, la manufacture Normant apparaît au 52e rang sur 115 manufactures répertoriées. On présente Antoine Normant comme un " fabricant industriel chargé d'enfants et établi à Romorantin depuis 2 ans ". Antoine Normant fait travailler, à cette période, sept ouvriers employés à la confection des étoffes. Il est désigné comme " chef de l'établissement de la mécanique de draps " . A son décès en 1813, son fils Antoine travaille comme commis dans l'usine de son oncle Pierre Silvain Marseille. La manufacture fait faillite le 13 janvier 1814, et l'on voit apparaître dans l'inventaire " les meubles meublants la maison de la dame Veuve Normant et qui appartiennent au-dit Marseille, situées faubourg Saint-Roch " . Selon un acte du 18 floréal an XIII (avril-mai 1805), Madame Normant dirige l'établissement dont le sieur Marseille est propriétaire. Un autre acte, du 18 juin 1815, stipule que les créanciers ont vendu aux enchères " la mécanique propre au cadrage, filature et confection de draps […] et autres objets composants l'atelier de teinture et fabrique du dit Sieur Normant " . A partir de cette date, il semble difficile d'établir une histoire unique de l'entreprise familiale. En effet, Antoine et ses frères, Augustin, Benjamin et René-Hippolyte vont s'associer et fonder différentes manufactures comme celles d'Augustin Normant ou Normant-Lefebvre, suite au mariage de René-Hippolyte avec Anne-Claire Lefebvre, Normant Frères et Hardy… Vers 1811, Antoine rapporte de Belgique une filature à manège mue par des chevaux : Mule Jenny. C'est la première filature mécanique dans la région. La famille tend à agrandir ses terres avec l'achat de diverses propriétés comme le moulin des Poulies en 1814, l'usine de Moulin Neuf à Villeherviers en 1820, les Gués Raides à Lanthenay (acheté 50 000 francs, avant 1828, par Augustin, pour y construire une usine hydraulique2, le moulin à foulon des Tourneaux. Un acte de création de société, daté du 1er février 1823, établit l'association des trois frères, Antoine, René-Hippolyte et Benjamin sous la dénomination "Normant Frères"4. Cette collaboration remonte en réalité au 1er janvier 1816 et sera poursuivie sur 20 ans. Peu de temps après, début février, Benjamin décède et les deux frères survivants se réassocient le 11 février 5. En 1828, la société s'appelle " Normant Frères et Hardy ". En effet, l'entreprise familiale fait évoluer son nom selon les changements dus aux mariages (ici, union de Victoire Rosalie Normant à Denis Ferdinand Hardy), aux décès… . Avant le mariage de René-Hippolyte avec Anne-Claire Lefebvre en février 1827, la famille partage les biens de Benjamin qui n'avait pas de descendance. La future épouse est la fille de l'ancien sous-préfet Lefebvre et de Marie-Marguerite Normand, très certainement une cousine de la famille, ainsi que le laisse entendre le contrat de mariage . Un acte de mai 1828 mentionne la faillite de la manufacture d'Augustin Normant . Il nous précise qu'il était fabricant depuis " 15-16 ans " et qu'avant 1822, il exploitait la fabrique avec ses frères ; " alors sa position était avantageuse, en 1822 il fait monter sa pompe à feu qui devait mouvoir par la vapeur toute machine nécessaire à la fabrique de drap ". Comme cette pratique était trop onéreuse, il abandonne la pompe à feu, puis la revend 11000 francs (quand il l'a payée 24000 francs) à un manufacturier qui fera faillite après la livraison. L'usine hydraulique, qu'il installa aux Gués Raides à Lanthenay, lui a permis de passer de la confection de 1000-1100 pièces de drap par an à 1500 pièces. Un concordat apparaît entre Augustin Normant et la majorité de ses créanciers (au nombre de 46 dont Normant Frères et un autre Normant, ancien juge de paix à Chabris), avec la cautionnement d'Antoine et d'Hippolyte " négociants associés au même lieu de Romorantin ". Augustin fait la demande auprès des juges du tribunal de commerce de Romorantin que les pièces de draps non confectionnées soient vendues afin d'éviter leur détérioration, ainsi que les teintures, les machines et les matières premières : " on perdrait des bénéfices à ne pas convertir en drap la laine que l'on a ". En 1831, les manufactures de draps du royaume, travaillant comme les Normant principalement pour l'habillement militaire, congédient plusieurs centaines d'ouvriers à la suite de la réduction des commandes de l'armée pour les uniformes des troupes. En ces temps difficiles, Philippe-Augustin demande une aide financière à l'Etat, qui par une ordonnance du roi Louis-Philippe lui accorde à un prêt de 50 000 francs . La manufacture de M.M. Normant et Hardy (" Normant Frères et Hardy ") demande, elle aussi une avance de fonds au gouvernement. Mais la famille engage également une partie de sa fortune pour s'autofinancer. Au même moment, la sous-préfecture demande à l'entreprise d'employer les ouvriers sans travail, car le chômage touche gravement la vie économique de Romorantin . Les Normant s'intéressent également aux affaires politiques et sociales. Dès 1828, Antoine apparaît sur les listes des commerçants notables de Romorantin. En 1835, Hippolyte y est candidat . Antoine est élu maire de Romorantin de 1840 à 1842 et de nouveau de 1847 à 1849, conseiller général de 1842 à 1845, puis député du Loir-et-Cher en 1848-1849. Il fait parti des six représentants du peuple pour le Loir-et-Cher à l'Assemblée Nationale en 1848 . A son décès en 1849, son frère Hippolyte reprend la direction de l'usine et doit affronter une grève, qui dénonce l'enrichissement de la famille Normant par le travail des ouvriers. En effet, depuis 1830, les ouvriers de l'entreprise se mettent régulièrement en grève. Ainsi en 1840, 1849 , 1858 et 1861 au cours de laquelle, 192 ouvriers signent une pétition qu'ils adressent à l'Etat : " Depuis 50 ans environ que cette manufacture existe, les sous-signés [ouvriers] travaillent sans tarif, quoique dans toutes les autres fabriques de France il existe un tarif dans les ateliers ; et qui fait loi entre les patrons et les ouvriers " . La réponse de l'Etat sera que le tarif ne peut être mis en place par lui mais par l'accord des patrons et ouvriers. Néanmoins, on sent une évolution, qui reste à nuancer, à partir de 1862 dans une lettre adressée au Ministère de l'Agriculture : " L'établissement Normant le plus considérable de Romorantin […]. Les salaires sont généralement modiques ; ils sont fixés par des règlements. La relation entre les patrons et les ouvriers sont d'ailleurs faciles et les réclamations de ces derniers sont ordinairement accueillis lorsqu'elles sont justes et raisonnables "5 . Au milieu du siècle, la manufacture, pourvue de plusieurs machines à vapeur et de machines hydrauliques, fait travailler plus de 1500 ouvriers (sur les quatre sites). Rapidement, l'usine Normant Frères absorbe toute la fabrication en draperie cadrée du genre du fameux drap d'Elbeuf. Les expositions universelles leur permettent de concourir dans la première section des draps de laine. Le nom d'Augustin Normant apparaît dès l'exposition de 1831 . De même, en 1854 sont citées, entre autre, deux ateliers ; Normant-Lefebvre et Normant-Camille, le fils d'Augustin Normant . La manufacture Normant Frères reprend sur son papier à en-tête un bandeau " Exposition Universelle, Médailles [d'or] de 1ère classe 1855, 1867 " ainsi que la " Croix de chevalier de l'ordre national de la légion d'honneur, 1850 A.H.Normant " (remise à René-Hippolyte). Dans la mouvance paternaliste, la famille construit une quarantaine de maisons ouvrières le long du faubourg Saint Roch et accorde quelques prêts aux ouvriers. En 1841, Antoine achète " l'emplacement d'une maison actuellement démolie " et la donne le même jour à la ville de Romorantin ainsi qu'une somme de 10 000 francs contre l'engagement d'y fonder l'école . L'incendie de la fabrique générale en 1841 fait se disperser les ouvriers dans différentes usines . Mais il met aussi à jour les risques importants d'incendie liés au travail dans une manufacture. Un corps de pompiers est formé et intégré à l'usine Normant ; il porte aussi secours à l'extérieur de l'établissement. En 1831, il y avait à Romorantin dix maîtres-fabricants de draps dont les Normant . On compte trois manufactures principales qui emploient 1317 ouvriers dont 950 chez Normant et Frères (décomposé en 300 hommes, 450 femmes et 200 enfants). En 1861, après la faillite de leur concurrent Cottereau, ils demeurent la seule manufacture (en 1858, l'établissement de Monsieur Normant Camille, leur neveu et fils, existe mais souffre beaucoup). Les commentaires tirés de la situation industrielle de 1861 expriment une situation où " les débouchés se font toujours difficilement. Beaucoup d'ouvriers manquent d'ouvrage " . En effet, les Normant demandent de l'aide à l'Etat car ils se voient dans l'obligation de congédier un tiers de leurs ouvriers . A cette période les Normant emploient 680 hommes (dont 1/3 d'enfants) et 540 femmes (1/2 d'enfants). La deuxième génération reprend le flambeau, les quatre fils de René-Hippolyte se partagent les responsabilités. Suite à son décès en 1867, un acte est signé entre sa veuve, Anne-Claire Lefebvre et ses quatre fils ; " Madame Veuve Normant et ses fils s'associent ensemble pour fabriquer pour leur compte commun des draps de telles espèces et qualités que bon leur semblera " . Le capital social de l'entreprise est porté à 3.593.038,45 francs, le siège principal étant situé à Romorantin, au 9 faubourg Saint-Roch, ainsi qu'une succursale au 57 rue de Rivoli à Paris. Les chiffres montrent que les années 1879-1880 sont assez difficiles, les ouvriers travaillent 10h au lieu de 12h . Les salaires varient entre les quatre usines de la famille. Le 18 septembre 1883, Louis-Aristide, dit Lionel, quitte la société qui est, quant à elle, prolongée pour 15 ans1. Comme son frère, Hippolyte-Antoine se retire en 1889 au profit de Benjamin. Ce dernier se retrouve seul à la tête de l'entreprise car le quatrième frère, Antoine-Aristide décède, cette même année en avril ainsi que sa mère, Anne-Claire Lefebvre en septembre. S'en suit un procès, en 1890, qui oppose Jeanne Roujon, veuve d'Hippolyte-Antoine, aux autres descendants, Benjamin, Lionel, Rose Marguerite de Longuerue et Claire Coralie Bézard ; elle veut préserver les biens de son fils Pierre, mineur, face à la famille . Un état du patrimoine est fait, il laisse apparaître toutes les propriétés de la famille, implantées sur trois départements et vingt communes. Il permet de diviser les biens en cinq lots à peu près égaux pour chaque héritier. Il existe toujours à cette époque, les quatre usines ; celle du faubourg Saint-Roch, et les trois autres qui fermeront successivement, les Tourneaux arrêtée en 1895, Moulin Neuf en 1900 et Gués Raides en 1912. Dans cette période, la manufacture voit se soulever les ouvriers par différents mouvements de grève, notamment en 1899, qui amène la mise en place d'un règlement général . En juillet 1900, une quarantaine de jeunes ouvriers désirent une augmentation de salaire. Ils sont soutenus par 400 ouvriers sur les presque 1150 que comptent les deux dernières fabriques . La direction ne leur accorde pas d'augmentation mais les autorise à allonger leurs horaires hebdomadaires de manière à passer de 57 heures à 60 heures voire 66 heures comme les autres ouvriers . Le mouvement le plus dur se passe en 1910-1911. Les 3 et 4 novembre 1910, une grève est lancée contre les agissements d'un contremaître, nommé Landard. Il n'est pas renvoyé mais on le change de poste. Le 30 décembre, une vingtaine d'ouvriers " tondeurs " stoppent le travail1. A ce moment l'entreprise Normant occupe 1000 ouvriers environ. Le 3 janvier 1911, Benjamin Normant ferme l'usine, ce qui a pour conséquence de mettre tout le personnel au chômage. Le 6, à la réouverture des portes, aucune concession n'avait été accordée mais tous reprennent le travail. Seulement le conflit ne s'est pas résolu et la grève reprend tout l'été, du 25 juillet au 4 septembre. Plus de 400 ouvriers s'opposent aux décisions de la direction qui refuse de renvoyer Landard, le contre-maître. Il démissionne mais les ouvriers continuent la grève de peur de ne pas tous être repris. Ils seront tous réintégrés sauf une trentaine, mais à des postes différents et souvent moins rémunérateurs 1. En 1913, une cinquantaine de " rattacheurs " fait grève en vue d'une augmentation de salaire et de la suppression des amendes. Les amendes étaient très connues sur Romorantin car elles étaient la cause de nombreux mouvements de protestation. En effet, les ouvriers souffraient beaucoup de cette pratique et avaient le sentiment que les Normant s'enrichissaient grâce à elle. Les ouvriers ont à ce titre surnommé l'hôtel particulier de Lionel Normant " le château des amendes ". Ces grévistes sont tous des enfants de 13 à 17 ans, qui n'appartiennent à aucun syndicat. La direction accepte leur demande et leur octroie que la prime d'âge soit accordée dès 15 ans. En 1916, l'industrie drapière subit les conséquences de la première guerre mondiale, les usines du Nord se retrouvent derrière les lignes ennemies sauf une dont les machines sont ramenées à Romorantin et remises en état de marche. L'entreprise étend alors sa production et fabrique des tissus de laine cardée et de laine peignée. En 1920, au décès de Benjamin, sa veuve et ses trois enfants poursuivent l'œuvre familiale et fondent la manufacture " Normant et Cie ", société en commandite simple . René-Hippolyte, son fils est nommé gérant responsable, les autres sont des commanditaires L'entreprise devient une société anonyme les "Etablissements Normant ", en 1925, au décès de la veuve de Benjamin, Louise Puistienne. L'usine connaît une période de grande prospérité de 1925 à 1929. En mai 1935, une grève presque aussi importante qu'en 1911 se met en place et dure 10 jours. A cette époque, l'entreprise emploie 477 hommes, 390 femmes et 112 enfants de 13 à 16 ans . Pendant la seconde guerre mondiale, elle est occupée par les troupes allemandes et mettra du temps à se réadapter au sortir du conflit. A la mort de René Hippolyte, dernier descendant masculin de la famille, en 1951, l'entreprise est dirigée par son beau-frère puis ses gendres. Elle ferme ses portes en 1969. Les Etablissements Normant, c'est à dire la manufacture proprement dite avec son importante entrée, l'hôtel particulier du faubourg Saint-Roch, l'actuelle mairie qui fut le siège social et l'hôtel particulier de Lionel Normant ainsi que la pagode chinoise qui provient d'une exposition universelle, sont classés au titre des Monuments Historiques.

      Les archives de l'entreprise Normant de Romorantin sont entrées aux Archives départementales du Loir-et-Cher par voie extraordinaire. Elles ont été déposées par le liquidateur de l'entreprise, Maurice Passot, en deux étapes, la majeure partie en janvier 1980 et le reliquat en janvier 2004. Elles retracent la vie de l'entreprise du milieu du XIXe siècle jusqu'à la cessation de son exploitation en 1969. La liquidation complète, quant à elle, date de 1976. Il est important de préciser que ce fonds, classé dans la sous-série 36 J, est très lacunaire, sorte d'"épaves d'archives d'entreprise ". Les documents qui nous sont parvenus ont été préservés car une partie d'entre eux était utile au travail du liquidateur. Nous savons qu'une somme importante des archives de l'entreprise a été détruite lors de la fermeture de l'usine, sur place. Ceci explique pourquoi le fonds comporte de nombreux manques ; il n'y a aucune information concernant les clients, les fournisseurs ou bien encore le travail effectué dans les ateliers. De la même manière, les renseignements relatifs aux ouvriers, s'ils sont nombreux, n'en sont pas pour autant complets. Parallèlement, des éléments importants de la vie de l'entreprise, comme les grèves, n'apparaissent pas alors qu'ils sont très bien représentés dans d'autres fonds des Archives départementales. Le fonds représente 6 mètres linéaires.

      Comme cela a été indiqué dans l'introduction, le fonds a été déposé par Maurice Passot, le liquidateur. Il a souhaité se défaire, dans un premier temps, d'une partie des documents, qu'il avait récupérés lors de la fermeture de l'entreprise afin de poursuivre son travail. Néanmoins, il avait conservé quelques documents propres à l'entreprise, comme les registres de procès-verbaux d'assemblées générales, et principalement des classeurs contenant les dossiers du personnel en vue de possibles demandes de certificats pour la retraite. Aucune demande n'ayant été formulée depuis 1999, Maurice Passot n'avait plus utilité à conserver ces documents et a préféré les déposer aux Archives départementales. Nous n'avons pas d'information concernant les conditions de conservation des documents avant cette prise en charge. De la même manière, nous n'avons pas mis à jour d'inventaires qui auraient pu nous renseigner sur le devenir des documents conservés sur le site de l'entreprise Normant avant sa fermeture. Le fonds n'avait jusqu'alors jamais été répertorié et ne semble avoir été classé à aucun moment. Il demeure trop peu d'éléments pour pouvoir traiter ces documents comme un fonds d'archives d'entreprise ordinaire et il semble toutefois délicat de n'y voir que des archives de famille. Il convient alors de le traiter comme un fonds d'archives d'" entreprise familiale ". Pour cette raison, nous ferons apparaître de manière distincte les documents concernant la famille (archives privées de la famille sur quatre générations) et ceux de l'entreprise, dans la mesure où, pour une majorité de pièces, il est possible de distinguer ces deux sources. Il n'a pas été réalisable, au vu des documents, de reconstituer la structure de l'entreprise. Les pièces ont alors été regroupées par grandes fonctions administratives. Les documents provenant du service du personnel, constitués sous la forme de cahiers d'appointements (établis par quinzaine et donnant précisément pour chaque ouvrier la place occupée dans l'usine, le nombre d'heures effectuées et les prix horaires) ou de fichiers du personnel, sont en bon état et permettent de reconstituer une image, presque intégrale, des employés de l'entreprise, sur une période allant de 1920 à 1969. Pourtant, il reste difficile de distinguer le site auquel correspond cette main d'œuvre, sachant que l'entreprise s'étendait sur quatre établissements (Romorantin, Bracieux) et deux boutiques sur Paris. On découvre des échanges épistolaires, notamment ceux des notaires de la famille au sujet des différentes successions, ou bien encore la correspondance de Madame Jeanne Normant, veuve de Hippolyte Antoine, avec un ami de la famille, et qui laisse sous-entendre un problème d'épidémie à Romorantin en 1889-1890. On trouve aussi différents documents, de manière marginale, comme la liste alphabétique des appareils admis par le service des réseaux téléphoniques et le contrat d'abonnement de 1889 pour l'appartement rue de Rivoli à Paris. Le fonds conserve, malgré des lacunes sérieuses, un intérêt notable, notamment pour des chercheurs qui souhaiteraient se renseigner sur cette entreprise (étude sur le personnel, …) qui joua un rôle important dans l'économie du département. Il permet d'élargir les recherches en offrant une ouverture sur différents autres fonds et séries. Par analogie avec la loi n°79-18 du 3 janvier 1979 sur les archives, les conditions de communicabilité sont de 30 ans pour les procès-verbaux d'assemblées générales et de conseils d'administration, de 60 ans pour les documents mettant en cause la vie privée et de 120 ans pour les dossiers du personnel.

      SOUS-SERIE 3 E : NOTAIRES 3 E 23/789 Etude Jacheet.- Actes notariés : procès suite à la faillite de Pierre Marseille (juin 1815). 3 E 24/615 Etude Boissay. - Actes notariés : acte de société Antoine, René-Hippolyte et Benjamin (février 1823). 3 E 24/638 Etude Boissay. - Actes notariés : contrat de mariage entre René-Hippolyte et Anne-Claire Lefebvre (février 1827). Actes notariés : partage des biens à la mort de Benjamin avant le mariage (février 1827). 3 E 24/741 Etude Boissay. - Actes notariés : don d'Antoine Normant à la mairie de Romorantin d'une maison (août 1841). 3 E 24/757 Etude Boissay. - Actes notariés : confirmation de la donation d'asile à la mairie de Romorantin par Antoine Normant ( 15 septembre 1843). Actes notariées : révocation de la donation (29 septembre 1843). 3 E 24/793 Etude Boissay. - Actes notariés : testament holographique d'Antoine Normant (août 1849). SERIE M : ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET ÉCONOMIE 7 M 200 Agriculture .- Statistiques diverses : faillite Cottereau (1861). 8 M 15 Commerce et Industrie. - Exposition Universelle : échantillons de draps (1831). 8 M 18 Commerce et Industrie. - Exposition Universelle (1876). 8 M 19 Commerce et Industrie. - Exposition Universelle (1854-1857). 9 M 1 Commerce et Industrie.- Situation Industrielle, établissement de draps (1800). 9 M 3 Commerce et Industrie.- Situation Industrielle, établissement de draps (1858-1864). 9 M 5 Commerce et Industrie.- Situation Industrielle, établissement de draps (1810-1815). 9 M 10 Commerce et Industrie.- Situation Industrielle, établissement de draps (1872-1877). 9 M 12 Commerce et Industrie.- Situation Industrielle, établissement de draps (1879-1883). 9 M 15 Commerce et Industrie.- Situation Industrielle, établissement de draps (1830-1858). 9 M 24 Commerce et Industrie.- Situation industrielle, établissement de draps ; échantillons de draps (1831). 10 M 20 Inspection du travail.- Correspondance au ministre de l'agriculture (1862). Pétition des ouvriers Normant (1861). 10 M 45 Travail et main d'œuvre .- Grèves usine Normant : correspondance, affiches (1900-1911). 10 M 46 Travail et main d'œuvre .- Grèves usine Normant : correspondance, affiches (1935). SERIE R : AFFAIRES MILITAIRES 2 R 151 Habillement de l'armée.- Marché public : correspondance entre le préfet du Loir-et-Cher et le Ministère de la Guerre (juillet-août 1841). SERIE U : JUSTICE 1 U 5/1 Tribunal de commerce.- Liste des commerçants notables (1828-1843). 3 U 36/6 Tribunal de commerce.- Procès suite à une succession (1890-1892). 6 U 4/1 Tribunal de commerce.- Actes de société : association (mai 1868), prorogation de la société ( juin 1881), retrait de la société (septembre 1883), retrait de la société (mai 1889). 6 U 4/5 Tribunal de commerce.- Déclaration de société (1920). 6 U 5/1 Tribunal de commerce.- Actes de société : dossier de faillite de Pierre Marseille (janvier 1814). Actes de société :dossier de faillite d'Augustin Normant (mai 1828), bilan actif/passif (mai 1828), liste de créanciers (octobre 1828), concordat (mai 1829).